Béatrice Fena · Encadreuse de dessins

Les métiers des musées d’Orsay et de l’Orangerie
Béatrice Féna, encadreuse de dessins

Je m'appelle Béatrice, je suis encadreur de dessins au musée d'Orsay de l'Orangerie. Je m'occupe de la collection de ce musée, de la collection d'art graphique de ce musée qui regroupe plusieurs items comme des dessins d'artistes, des calques d'architecture, des dessins d'architecture et aussi bien des photos. On parle d'une période de 1850 à à peu près 1910. Je réalise à peu près mille encadrements par an pour des expositions, des accrochages, des présentations.
Mon métier est un véritable métier d'encadrement ou d'encadrement au vu d'expositions, mais à la base, je suis force de proposition pour monter les œuvres qui sont une grande fragilité dans des supports qui respectent complètement la conservation préventive, c'est à dire qui respectent chimiquement la qualité du papier et par conséquent, ça prévient des éventuels dommages que pourraient vivre ces œuvres-là.
Quand une œuvre arrive à l'atelier, je regarde en premier lieu son état et évidemment, la qualité du papier, de quelle période elle est aussi, c'est très important le style et c'est ça qui va déterminer en réalité le montage. Voilà, particulièrement typique, une œuvre dont les bords sont très, très abîmés, et qui est issue d'un album. L'œuvre est ici, elle est collée en plan, en fait sur une feuille d'album et donc on ne va pas l'enlever de sa feuille d'album. Ici, nous allons quand même la mettre sous passe-partout pour qu'elle soit mieux gardée, mieux préservée, parce qu'elle n'est pas excessivement fragile. Les coins, comme vous pouvez voir, sont abîmés et donc j'ai réalisé des coins photos qui permettent de ranger cette œuvre en laissant justement les coins abîmés apparents pour ne pas les contraindre.
On peut ouvrir pour récupérer l'œuvre. Donc ça c'est vraiment typique des choses qu'on peut faire en concertation avec la restauration et la conservation, sur des œuvres très, très abîmées. 90 % des œuvres sont encadrées sous passe-partout, car ça permet à l'œuvre de ne jamais toucher le verre quand il est encadré dans son cadre. Le verre ne doit pas toucher l'œuvre.
Et puis, ça permet aussi le passe partout, qui est rigide, de maintenir l'œuvre dans un carton, donc rigide, et de pouvoir ensuite le stocker dans des réserves plus facilement afin qu'il ne s'abîme pas. Avec les conservateurs, nous allons étudier l'ouverture, en fait, du passe-partout sur l'œuvre. Est-ce le passe-partout va venir sur l'œuvre ou bien est-ce qu'au contraire on va laisser les bords dégagés pour un propos particulier ?
Ou bien que l'œuvre, les bords, les bords de l'œuvre sont trop peints ou sont trop dessinés et donc il faut absolument dégager ça ? Mais tout ça se fait en concertation et par la suite, je fais mon passe partout et je réalise bien sûr le montage. Chaque montage est presque du cas par cas. On va avoir des œuvres aux coins très très abîmés, donc on ne pourra pas faire la même chose que sur une œuvre avec des coins parfaits ou restaurés.
Et c'est pour ça qu'il faut avoir une grande connaissance en réalité de tous ces petits montages qu'on peut faire avec du papier et inventer en permanence des façons de faire. Parce que, encore une fois, chaque œuvre a vécu et son vécu nous devons faire avec. 
Ce qui est très agréable dans ce métier, quand on aime la minutie et la patience, c'est de pouvoir se concentrer complètement sur ces œuvres et d'être au plus près de l'artiste et voir même de ressentir presque le geste de l'artiste sur la feuille de papier, ce qui est très touchant et pour quelqu'un qui aime l'histoire de l'art très très agréable évidemment.
J'ai choisi de faire ce métier car j'aimais l’histoire de l'art. J'avais envie de quelque chose de plus concret après mes études d'histoire de l'art, et le fait d'être au plus près, encore une fois, de ces œuvres me touchait. J'aimais aussi le fait d'être concentrée sur une œuvre, de prendre du temps et bien sûr de la valoriser à la fin, car c'est ça qui fait plaisir. C'est une petite chose qui pourrait paraître presque rien. Issue d'un carnet, un croquis, on peut en faire quelque chose de vraiment de très très beau et très intéressant.
Surtout, l'avantage d'être monteur en dessin dans une institution tels que le musée d'Orsay et de l'Orangerie, c'est de pouvoir continuer à faire des formations. On ne sait pas tout quand arrive dans un musée. On a ses connaissances d’histoire de l’art, de papier. Mais malgré tout, on ne connaît pas toutes les périodes et on ne connaît pas tous les papiers, évidemment, loin de là. Et par conséquent, ces formations proposées et ces stages aussi bien dans des institutions de restauration que des formations qui permettent de continuer à connaître toutes ces époques et ces papiers, c'est primordial en fait. Donc on peut continuer à se former toute sa vie dans un musée.

Crédits 
•    Direction du numérique
•    Direction des ressources humaines
•    Réalisation : Marie-France Gripois
•    Animation générique : Ariane Lehericay
•    Avec la participation de : Béatrice Féna
•    Edgar Degas, Jeune fille étendant un bras droit vers la gauche, dessin, 1932, Paris, musée d’Orsay, ©RMN-Grand Palais, (musée d’Orsay) Thierry le Mage 
•    Emile Vaudremer, Projet de villa, élévation, vers 1880, papier calque, crayon, aquarelle, Paris, musée d’Orsay, ©musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais, Patrice Schmidt
•    Anonyme, Palais de justice de Paris, 1866, papier, imprimé, Paris, musée d’Orsay, ©musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais, Alexis Brandt
•    Felix Nadar, Charles Baudelaire, vers 1855, épreuve sur papier salé Paris, musée d’Orsay, ©musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais, Alexis Brandt