Saut d'obstacle, cheval noir
En 1887, le britannique Eadweard Muybridge fait paraître onze volumes de photographies sous le titre Animal locomotion. Chaque planche montre des vues du même sujet saisi à des phases successives d'un mouvement. Plus de cinq cents de ces planches sont consacrées à des sujets humains, une centaine à des chevaux montrés à des allures différentes et cent vingt à des animaux divers, biches, éléphants, chiens, porcs, taureaux, lions et autre chats ou perroquets.
Une dizaine d'années auparavant, Muybridge avait été le premier photographe à analyser la locomotion des êtres vivants, à l'instigation de Leland Stanford, magnat du chemin de fer et ancien gouverneur de Californie. Passionné de chevaux, Stanford demande à Muybridge de confirmer par la photographie les travaux graphiques d'Etienne-Jules Marey sur le galop du cheval qui font alors débat. Les planches de Animal locomotion sont réalisées quant à elles pour l'Université de Philadelphie où le peintre Thomas Eakins (1844-1916), intéressé lui-même par la représentation du mouvement, a fait venir Muybridge.
Ces images, rendues possibles grâce à une série d'appareils à déclenchement automatique, connaissent un grand retentissement en Europe et aux Etats-Unis. Une importante revue américaine, Scientific American, leur consacre un article en octobre 1878, tandis qu'en décembre de la même année d'autres planches sont reproduites dans la revue française La Nature. En même temps que les scientifiques, les artistes sont très influencés par ces instantanés : Eakins bien sûr, mais aussi et surtout les français Ernest Meissonier (1815-1891) et Edgar Degas (1834-1917) qui reprend notamment dans diverses versions de Cheval se cabrant les positions de l'animal fixées par Muybridge.