Acquisition · Œuvres de Félix et Marie Bracquemond

Sous-titre
Importante donation des descendants des artistes et achat de cinq autres œuvres
Marie Bracquemond, Félix Bracquemond
Fonds Bracquemond (168 oeuvres)
© Musée d’Orsay, dist. GrandPalaisRmn / Sophie Crépy

Après la donation majeure de 173 œuvres par les descendants de Félix et Marie Bracquemond le 5 avril 2024, le musée d’Orsay annonce l’acquisition de cinq autres œuvres de ces deux artistes très importants de la deuxième moitié du XIXe siècle.

Corps de texte

Félix Bracquemond a en effet été l’une des figures de proue du renouveau de l’eau-forte et du japonisme en France, tout en donnant un nouveau souffle à la céramique à la direction de la manufacture Charles Haviland à Auteuil. Il participa à la première exposition impressionniste en 1874. Quant à Marie Bracquemond, elle fut aux côtés de Mary Cassatt et de Berthe Morisot l’une des trois grandes artistes ayant pris part à l’aventure impressionniste.  Ces nouvelles acquisitions viennent notamment rejoindre La Dame en blanc de Marie Bracquemond et le service Rousseau de Félix Bracquemond.

Une donation majeure

Le musée d’Orsay a reçu en avril 2024 des descendants de Félix et Marie Bracquemond, un don majeur de 173 œuvres des deux artistes, composé de 11 peintures et 67 dessins de Marie Pasquiou Bracquemond, et de 8 peintures et 87 dessins et calques de Félix Bracquemond, son époux. La sélection, effectuée par les donateurs, couvre toute la carrière des deux artistes, et montre leurs méthodes et techniques.

Formée dans l’atelier d’Ingres puis élève des peintres d’histoire Signol, Laugée et Merle, Marie Pasquiou (1840-1916) épouse Félix Bracquemond (1833-1914) en 1869. Elle expose régulièrement au Salon entre 1859 et 1875, principalement des portraits et des scènes de genre historiques d’inspiration médiévale qui rappellent les œuvres de la période troubadour d’Ingres. Grâce à son cadre qui porte une étiquette avec le numéro « 287 », il est possible d’établir avec certitude que cette œuvre a été présentée par l’artiste sous ce même numéro au Salon de 1875 avec pour titre La Lecture. Son exécution minutieuse, son petit format et son sujet d’inspiration médiévale s’apparentent à sa production proche du style Troubadour dont son maître, Ingres, avait été l’un des représentants autour de 1815-1820. Ce tableau a une place toute désignée dans les collections nationales puisque c’est la dernière œuvre à avoir été exposée par l’artiste au Salon. Elle constitue en ce sens un jalon important de sa carrière. Par la suite, outre l’Exposition Universelle de 1878, Marie Bracquemond sera présente dans les expositions impressionnistes de 1879, 1880 et 1886.

La donation comprend également plusieurs dessins préparatoires à l’œuvre Les Muses des arts, dont ce très beau dessin qui avait été exposé en 2022 dans le cadre de l’exposition Le Décor impressionniste : aux sources des nymphéas au musée de l’Orangerie. Cet ensemble majeur, seul témoignage de l’ambitieuse peinture sur faïence réalisée par Marie Bracquemond, a pu être complété lors de la vente chez Artcurial. La donation comporte également quatre dessins préparatoires aux illustrations de Marie Bracquemond publiées das la revue La vie moderne publiées en 1881-82. Elle y prend pour modèle ses proches, dont Félix et leur fils Pierre.

Les dessins de Félix Bracquemond dans la donation sont pour beaucoup des calques colorés en lien avec ses céramiques et son travail à la manufacture d’Auteuil, mais la donation inclut de beaux dessins de forêts, au fusain ou au lavis, montrant son intérêt pour ce sujet que l’on retrouve dans une série de huit petits tableaux à l’huile datant de sa jeunesse. L’un de ses autres sujets de prédilection, les oiseaux, est manifeste dans le très beau calque La Question sociale, dans lequel différentes espèces incarnent les vices des hommes et leurs rapports de force.

La vente Marie et Félix Bracquemond chez Artcurial le 30 avril 2024

L’acquisition d’une série de cinq œuvres, dont quatre par voie de préemption, a permis au musée de compléter et d’enrichir le don consenti par la famille Jundt, descendants des Bracquemond, dont un tableau important de Marie Bracquemond, représentant son fils. La palette de Marie Bracquemond s’éclaircit lorsqu’elle rejoint les impressionnistes, dès 1879. Sa touche se fait plus libre tandis que ses sujets se détournent de l’histoire au profit de scènes évoquant la vie moderne. Cinq de ses œuvres dont trois peintures figurent à la dernière exposition impressionniste (1886). Parmi elles, un Portrait de M. F. Bracquemond, son époux, et un Portrait de jeune garçon que le catalogue de la vente chez Artcurialle 30 avril 2024, identifie au Portrait de Pierre Bracquemond enfant (lot n°6). Âgé ici de onze ans, Pierre Bracquemond (1870-1926), qui deviendra artiste à son tour, est le fils unique de Félix et Marie Bracquemond, laquelle le prend souvent comme modèle. Le caractère très abouti de cette œuvre, sa présence à la dernière exposition impressionniste, ses liens profonds avec l’histoire de la famille Bracquemond dans laquelle elle est demeurée jusqu’à présent contribuent à enrichir significativement le fonds du musée d’Orsay dédié à Marie Bracquemond.

Le musée d’Orsay s’est également enrichi de deux dessins préparatoires de Marie Bracquemond pour son grand panneau décoratif Les Muses des arts.
Marie Bracquemond, qui fut une artiste importante de l’atelier d’Auteuil dirigé par son époux Félix, et la première à introduire la céramique dans une exposition impressionniste en 1879, conçut en effet ce décor monumental de carreaux de céramique pour le stand de la manufacture Haviland à l’Exposition universelle de 1878 à Paris. Sept muses y sont représentées au lieu des neuf énéralement admises, dont celles de la Peinture, l’Architecture et la Sculpture qui remplacent dans cette composition les allégories des arts libéraux. Cette œuvre monumentale a priori détruite n’est malheureusement plus connue que par des dessins préparatoires et une photographie. Le dessin aquarellé acquis à la vente du 30 avril 2024 montre un état sans doute précoce du projet, avec une composition en hauteur largement ouverte sur le ciel et sans doute destinée à orner une porte de l’Exposition universelle comme l’indique une annotation de la main de Félix au bas de l’aquarelle. Le dessin au fusain et à la gouache constitue quant à lui une étude pour la muse de la Poésie, qui témoigne notamment du travail de l’artiste sur la robe soyeuse et le visage empreint de solennité tourné vers le spectateur. Avec un dessin et une gouache préparatoire à l’œuvre Les Muses des arts, issus de la donation, le musée d’Orsay conserve désormais la collection de référence pour cette œuvre, capitale pour l’histoire de la céramique.

Deux dessins d’arts décoratifs réalisés par Félix Bracquemond ont également pu être acquis lors de la vente. Le dessin préparatoire à un plat commémoratif de la guerre franco-prussienne qui semble n’avoir jamais été exécuté, précisément daté de décembre 1870, résume de manière allégorique les événements : la France apparaît sous les traits d’une jeune femme, entièrement vêtue de noir et enveloppée dans le drapeau français qui devient son linceul puisqu’elle gît inanimée au bord du Rhin, tandis que les feux de la guerre au loin sont encore visibles. La figure a fait l’objet d’une première ébauche au bas de la feuille à la mine graphite, ainsi que son poing un peu plus haut, tandis qu’une inscription de la main de Bracquemond décrit avec lyrisme son intention. Ce dessin témoigne non seulement de l’engagement politique de son auteur et complète l’ensemble important d’œuvres liées à la guerre de 1870 et à la Commune conservées au musée d’Orsay. La grande étude pour un sucrier du service Parabère relève d’un travail très différent et relativement isolé dans l’œuvre de Bracquemond de par son style empruntant aux formes rocailles du XVIIIe siècle. Le service ne fut pas réalisé sous la forme présentée ici, mais ce dessin révèle le brio avec lequel Bracquemond passe de la forme du sucrier au décor rocaille épousant intimement le galbe du pied, de la panse et du couvercle, ainsi que le plateau asymétrique qui parachève l’ensemble. Ce dessin complète l’ensemble de trois calques de travail pour le service Parabère donnés par la famille Jundt en début d’année.

Images
En librairie-boutique