Thème
La République en quelques dates
Le point de vue historique fait du XIXe siècle le temps de l'installation difficile mais définitive du régime républicain en France, précédé par deux grands « essais » : la Première et la Deuxième République, alternant avec différents systèmes politiques.
La Première République, issue de la Révolution de 1789, est proclamée le 21 septembre 1792, à la suite de la chute de la Monarchie. À partir de 1804, le régime napoléonien, puis la Restauration, la remplaceront pendant plusieurs décennies.
La Deuxième République, issue de la Révolution des 22, 23 et 24 février 1848 à Paris, est proclamée le 4 mai 1848. Elle s'achève avec le coup d'État du prince-président Louis-Napoléon Bonaparte – futur Napoléon III – le 2 décembre 1851 qui ouvre la période du Second Empire.
La Troisième République, proclamée le 4 septembre 1870 après la guerre franco-prussienne et la défaite de Sedan entraînant la déchéance de l'Empire, a des débuts hésitants et ne s'impose que progressivement.
En 1871, l'Assemblée nationale est majoritairement monarchiste. En réaction à la défaite et à l'armistice signé par le gouvernement s'ensuit à Paris une insurrection réprimée dans le sang, la Commune (18 mars 1871-28 mai 1871).
En 1873, après la chute de Thiers, l'élection à la présidence de Mac-Mahon et le gouvernement du duc de Broglie instaurent « l'Ordre Moral », un mouvement de réaction royaliste qui veut rétablir la monarchie (échec du retour du prétendant au trône, le comte de Chambord, descendant de Louis XV).
Le 30 janvier 1875, l'amendement du député Wallon définit le mode d'élection du président « de la République » par le vote à la majorité absolue des suffrages du Sénat et de la Chambre des députés. La Constitution de 1875 est un compromis.
En mars 1876, puis octobre 1877, les républicains remportent les élections législatives.
En janvier 1879, Mac-Mahon démissionne. Jules Grévy, un « vrai » républicain, est élu président de la République.
La période 1880-1884 voit le vote de grandes lois républicaines sur les libertés publiques, l'enseignement, l'établissement des grands symboles républicains…
Les images de la République
Le mot « images » revêt ici la signification d'allégories ou de symboles de la République. Les symboles de la République qui sont devenus permanents, objets d'un consensus, sont au nombre de cinq.
Le drapeau tricolore
Lancé par la Révolution, puis défendu par Lamartine en 1848 contre le drapeau rouge (ce drapeau de la loi martiale arboré par la Garde nationale qui tira sur les insurgés en 1791 est repris à son compte par le peuple insurgé). Il est le grain de sable qui fait échouer en 1871, puis en 1873, le retour du comte de Chambord comme roi de France car il exige de revenir au drapeau blanc, symbole de l'Ancien Régime. Le drapeau tricolore ne s'éclipse donc que pendant la Restauration.
La Marseillaise
Chant patriotique et guerrier, issu de la Révolution, et composé en 1792 par Rouget de Lisle pour l'armée du Rhin à Strasbourg (guerre entre la France et l'Autriche), devient définitivement l'hymne national en février 1879.
La Fête nationale du 14 juillet
Elle commémore à la fois la prise de la Bastille, symbole de l'absolutisme royal, en 1789 et la fête de la Fédération du 14 juillet 1790. Le 14 juillet s'impose avec difficulté en 1880.
La devise « Liberté, Égalité, Fraternité »
Issue de l'article 1er de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.
Marianne
La France est l'un des rares pays où la figure incarnant le régime politique est à la fois officielle et si populaire qu'on lui a donné un prénom et les traits d'une femme. Depuis la fin du XIXe siècle, Marianne incarne aussi bien la liberté que la République, la Révolution ou la France.
D'autres images
D'autres images-symboles de la République se sont forgées à partir d'événements historiques et de personnages ayant, eux, réellement existé. À l'inverse des symboles permanents de la République, elles incarnent des valeurs propres à la Troisième République et reflètent son installation en force dans les années 1880-1890 :
- Les « bons » rois de France – « rois » au sens large – : Charlemagne, Philippe-Auguste, Saint Louis, Henri IV, Louis XIV, auxquels il faut adjoindre Napoléon…
- Les héros patriotes : Vercingétorix, Jeanne d'Arc, Bayard, Thiers « le libérateur du territoire » en 1871…
- les héros révolutionnaires : Danton, Robespierre, Marat, le jeune Bara…
- les héros républicains : Léon Gambetta « le commis voyageur de la République », Jules Ferry…
- les héros « modernes » : Louis Pasteur, Victor Hugo…
- les événements qui ont fait la France moderne : le partage de Verdun (843), Bouvines (1214), l'ordonnance de Villers-Cotterêts (1539), Rocroi (1643), le 14 Juillet (prise de la Bastille en 1789 et fête de la Fédération en 1790), le 4 août (nuit du vote par l'Assemblée constituante de la fin du système féodal en 1789) et le 26 août 1789 (adoption des derniers articles de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen), Valmy (première victoire des guerres de la Révolution en 1792), Austerlitz (victoire de la Grande Armée de Napoléon Ier en 1805)…
La diffusion des symboles sous la Troisième République
Les républicains ont compris l'importance capitale de la diffusion des idées républicaines par l'image et ses multiples supports. Un véritable culte de la République s'instaure. Ainsi, entre 1880 et 1900, ce sont plus de 220 monuments publics qui sont érigés, dont 90 ont pour figure directe la République, les autres célébrant les grands personnages incarnant l'esprit républicain. À la fin de cette période, l'idée républicaine est si bien intégrée par les Français que la figure au bonnet phrygien signifiera indifféremment la République et la France. Parallèlement à la réalisation de ces monuments, de très nombreuses œuvres de taille modeste sont diffusées et trouvent leur place dans la décoration des logements : bustes ou profils sculptés, médailles, lithographies… À côté du culte public rendu à la République, se développe ainsi un culte privé.
Ressources
Œuvres à découvrir en classe
Pour compléter votre visite, quelques œuvres rarement exposées en raison de la fragilité de leur support vous sont proposées en vue d'une consultation en classe.
Photographies
- Etienne Carjat (1828-1906), Portrait du peintre Gustave Courbet, vers 1861, épreuve photomécanique
- François-Joseph Delintraz (actif dans les années 1860-1880), La rue Royale après les incendies de la Commune, 1871, épreuve sur papier albuminé à partir d'un négatif verre
- Charles Hugo (1826-1871), Victor Hugo devant le rocher des Proscrits, vers 1853, épreuve sur papier salé
- Neurdein frères, Obsèques de Victor Hugo. Aspect de l'Arc de Triomphe dans la matinée du 31 mai 1885, 1885, épreuve sur papier albuminé à partir d'un négatif au gélatino-bromure d'argent
- Pierre-Ambroise Richebourg (1810-1875), La salle des Pas-Perdus du Palais de Justice après les incendies de la Commune, 1871, épreuves sur papier albuminé à partir d'un négatif verre
- Thibault (actif vers 1848), La barricade de la rue Saint-Maur-Popincourt après l'attaque par les troupes du général Lamoricière, le lundi 26 juin 1848, 26 juin 1848, daguerréotype
Dessins
- Gustave Courbet (1819-1877), Autoportrait, 1871, fusain sur papier
- Ernest Meissonier (1815-1891), La barricade, 1848, aquarelle, traces de crayon sur papier
Publications
- Agulhon, Maurice, Marianne au pouvoir, 1880 à 1914, Paris, Flammarion, 1992 [1989]
- Aguhlon, Maurice, Marianne au combat : l'imagerie et la symbolique républicaines de 1789 à 1880, Paris, Flammarion, 2001
- Agulhon, Maurice et Bonte, Pierre, Marianne. Les visages de la République, Paris, Gallimard, coll. « Découvertes Gallimard », 1992
- Collectif, La Muse républicaine. Artistes et pouvoir, 1870-1900, cat. exp., Gand, Snoeck, 2010
- Collectif, Cohen, Evelyne et Monnier, Gérard (dir.), La République et ses symboles. Un territoire de signes, Paris, Publications de la Sorbonne, coll. « Histoire de la France aux XIXe et XXe siècles », 2013
- Collectif, Nora, Pierre (dir.), Les Lieux de mémoire, La République, vol. 1, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque illustrée des histoires », 1985
- Collectif, Nora, Pierre (dir.), Les Lieux de mémoire, La Nation, vol. 2, t. I, II et III, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque illustrée des histoires », 1986
- Fourest, Caroline et Venner, Fiammetta, Les Interdits religieux, Paris, Dalloz, 2010
- Hayat, Samuel, Quand la République était révolutionnaire. Citoyenneté et représentations en 1848, Paris, Seuil, 2014
- Maille, Michel, La Laïcité. Solution d'hier, problèmes d'aujourd'hui, Paris, Dalloz, 2015
- Nord, Philip, Le Moment républicain. Combats pour la démocratie dans la France du XIXe siècle, Paris, Armand Colin, 2013 [1995]
- Nord, Philip, Les Impressionnistes et la politique. Art et démocratie au XIXe siècle, Paris, Tallandier, 2009
- Ozouf, Mona, De Révolution en République. Les chemins de la France, Paris, Gallimard, coll. « Quarto », 2015
- Richard, Bernard, Les Emblèmes de la République, Paris, CNRS Editions, 2015 [2012]
- Thompson, Richard, La République troublée. Culture visuelle et débat social (1889-1900), Dijon, Les Presses du réel, 2008
- Collectif, La République, ses valeurs, son école. Corpus historique, philosophique et juridique, édition de Vincent Duclert, préface de Najat Vallaud-Belkacem, introduction de Mona Ozouf, Paris, Gallimard, coll. « Folio actuel », no 163, 2015.