Henri Rivière L’homme à la caméra

Eugèenie Rivière précédée de son chien dans un bois, Bretagne, vers 1895
Musée d'Orsay
Achat, 1987
© RMN-Grand Palais (Musée d’Orsay) / image RMN-GP
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En mars 1889, Rivière réalise un reportage avant l’heure sur le chantier de la tour Eiffel, peu avant l’inauguration de l’ouvrage. En compagnie de la troupe du Chat noir qui multiplie les facéties lors de l’escalade jusqu’au point culminant, il saisit la monumentalité novatrice de l’architecture métallique et les surprises plastiques qu’offre l’entrelacs des poutrelles. Ce faisant, il révèle les conditions de travail vertigineuses des ouvriers, comme le plombier hissé sur un échafaudage suspendu ou le peintre grimpé sur une corde à nœuds.
Ouvriers et visiteurs sur une poutre en arc du Campanile de la tour Eiffel, 1889
Musée d'Orsay
Don Mme Bernard Granet et ses enfants et Mlle Solange Granet, 1981
© Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt
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Plongées sur le Trocadéro en contrebas, contreplongées dessinant le squelette de fer, jeux de clair-obscur avec les silhouettes humaines sur l’horizon, variation des cadrages et des points de vue : tous ces effets rappellent l’esthétique du théâtre d’ombres, mais également les paysages de Hokusai et Hiroshige, ces graveurs japonais du début du 19e siècle qui jouaient sur l’échelonnement des plans. Quatre de ses clichés de la tour Eiffel, parmi les plus hardis, seront transposés par Rivière en lithographie, et en couleurs, dans un recueil publié en 1902 intitulé Trente-Six Vues de la Tour Eiffel.
Ouvriers sur un échafaudage en surplomb au pied du Campanile de la tour Eiffel, 1889
Musée d'Orsay
Don Mme Bernard Granet et ses enfants et Mlle Solange Granet, 1981
© Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt
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Arpentant les quais de la Seine, les ponts, les places et les boulevards, Rivière tient son appareil à mi-corps et capture attitudes et postures, bien souvent à l’insu de ses sujets, en se plaçant au plus près d’eux. Dans les quartiers les plus fréquentés, il regarde l’énergie déployée par des personnes affairées avec lesquelles il fait corps : femmes tenant des paniers aux halles, clientes devant des étals de marchands des quatre-saisons, matrone portant son fardeau sur l’épaule, passagers montant à bord d’un véhicule, et encore touristes mélangés aux promeneurs sur le Pont du Louvre.
Sur le pont du Louvre, Paris, vers 1890
Musée d'Orsay
Achat, 1987
© Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Alexis Brandt
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Avec son appareil à plaques de verre (une chambre à main légère et aisément transportable), Rivière saisit la mobilité des êtres : les efforts des chevaux de bât ou de fiacre, la course du chien vers son maître ou ce couple près de la Gare du Nord comme porté par l’élan de la danse. Plus audacieux encore, embarquant lui-même tantôt sur un omnibus à deux étages, tantôt sur un bateau-mouche, Rivière photographie son propre mouvement.
Passagers sur l'impériale d'un omnibus, Paris, vers 1890
Musée d'Orsay
Achat, 1987
© Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Alexis Brandt
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Parmi les tableaux animés de la ville, Rivière aime à observer les métiers ambulants, les numéros de force, les passagers des transports en commun, les animaux qui tirent calèches ou charrettes, ainsi que les flâneurs à pied et les badauds attroupés. Dans son objectif, les spectateurs deviennent à leur tour… spectacle.
Eugènie Rivière accoudée au balcon, Paris, vers 1896
Musée d'Orsay
Achat, 1987
© RMN-Grand Palais (Musée d’Orsay) / Hervé Lewandowski
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Rivière enregistre le temps étiré de la vie quotidienne avec son épouse. À Loguivy, Eugénie surgit dans la lande se découpant sur le relief rocailleux séparé du ciel par une oblique. À Paris, dans l’étroite enfilade du balcon, Rivière joue avec l’ombre portée par les montants d’une balustrade sur la robe de son modèle. À l’intérieur du meublé, il étudie les variations de lumière se posant sur elle. Intimes et pudiques, ses images sont la trace de l’union de « deux gamins […] qui s'aimaient avec une tendre confiance mutuelle qui ne s'est jamais démentie », comme il l’écrira plus tard dans ses mémoires.
Eugénie Rivière dans un paysage de lande, Bretagne, vers 1895
Musée d'Orsay
Achat, 1987
© Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt
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