Ces vases en grès chamois ont été exécutés dans l’atelier de grès artistiques de la rue Blomet à Paris, comme l’indique la présence de la marque d’atelier « H & Cie ». Ouvert par la manufacture Haviland et Cie en 1882 et dirigé par Ernest Chaplet, cet atelier marqua une étape importante dans la redécouverte du grès, l’un des matériaux céramiques les plus appréciés des artistes et des architectes à la fin du XIXe siècle.
Signé « E. D. s. » pour Édouard Dammouse, le décor des vases est à la fois moulé, gravé et rehaussé d’engobes colorés et d’or. Il figure d’une part une poule avec ses poussins et de l’autre un coq, empruntés au recueil de gravures sur bois Kachô sansui zushiki (« dessins de fleurs, oiseaux et paysages ») du japonais Katsushika Isai (1821-1880), élève d’Hokusai. Publié en 1865, ce recueil avait déjà inspiré Félix Bracquemond en 1866 pour certains motifs du service Rousseau.
Plusieurs épreuves en grès brun conservées dans des collections particulières témoignent d’une certaine diffusion de ce modèle japonisant d’Édouard Dammouse, tandis qu’une épreuve en porcelaine du musée national Adrien Dubouché à Limoges rappelle qu’il fit partie, en 1884, des quelques modèles édités en porcelaine par la manufacture Haviland à partir de moules envoyés de Paris. Cette production, trop coûteuse, fut abandonnée dès l’année suivante, de même que celle de l’atelier de la rue Blomet, qui fut cédé à Chaplet en 1885.
Cette paire de vases offerte par Madame Chantal Kiener vient donc compléter les collections du musée d’Orsay, dont le fonds consacré aux grès de la manufacture Haviland, assez peu développé, s’est enrichi en 2018 d’un grand cache-pot à décor d’acrobates issu d’une collaboration avec Ringel d’Illzach. Édouard Dammouse était quant à lui absent des collections du musée d’Orsay ; seul son frère Albert, dont les céramiques et les pâtes de verre sont mieux connues, y étant représenté.