Léon Frédéric est l’une des figures majeures de l’art belge de la fin XIXe siècle, évoluant du réalisme au naturalisme puis vers un symbolisme utopique. Il est l’un des principaux artistes belges associés au réalisme social avec Constantin Meunier et Eugène Laermans.
En 1887, il commence le projet ambitieux de deux séries de onze grands dessins au fusain, une série consacrée au « Blé », l’autre au « Lin ». Ces dessins sont destinés à encadrer un panneau central, « La Nature » ou « La Terre », image allégorique incarnée par une jeune paysanne entourée par douze enfants qui symbolisent les douze mois de l’année.
À travers ce format emprunté à l’art religieux, il donne aux plus humbles, en en particulier aux enfants, la majesté des figures bibliques. Il crée également un art belge qui s’inscrit dans l’héritage des Primitifs flamands, à la fois par ses connotations chrétiennes mais aussi par son sens du détail et du réalisme illusionniste, tout en se faisant le témoin engagé de préoccupations contemporaines liées à un contexte social houleux. En effet, l’artiste réalise ce cycle Le Blé et le Lin au moment où des émeutes de la faim éclatent dans le pays (en 1886), préludes aux grèves générales de 1893.
Le Blé IV - La Récolte, en 1888
Musée d'Orsay
© Musée d'Orsay, dist. RMN-Grand Palais / Sophie Crépy
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Comme dans L’Angélus de Jean-François Millet, le clocher de l’église du village est visible à l’arrière-plan, de manière discrète mais présente, et accentue les connotations religieuses du tableau. Chez Léon Frédéric, le naturalisme et le mythe se superposent. Il est en cela très proche du style de Zola (La Terre, 1888) alliant observation réaliste de paysans dans leur milieu et vision symbolique et monumentale.