La Maison de la folie à Eragny

Camille Pissarro
La Maison de la folie à Eragny
1885
huile sur toile
H. 73,0 ; L. 60,5 cm.
Legs Clément et Andrée Adès, 1979
© RMN-Grand Palais (Musée d’Orsay) / Gérard Blot
Camille Pissarro (1830 - 1903)
Oeuvre non exposée en salle actuellement

Matériellement difficiles pour Pissarro, les années 1880-1885 marquent une évolution certaine dans sa manière de peindre. Celle-ci tient tout autant à la réflexion menée en commun au sein du groupe de Pontoise (Cézanne, Gauguin, Guillaumin) qu'à ses recherches personnelles sur la lumière et ses effets.
En 1882, Pissarro a quitté Pontoise pour Osny avant de s'installer à Eragny-sur-Epte en 1884. Il y finira ses jours dans une maison acheté en 1892. La maison de la Folie date de son arrivée à Eragny.
Comme La maison du pendu de Cézanne (1873, musée d'Orsay), le titre correspond à la toponymie traditionnelle du lieu et souligne l'ancrage de l'oeuvre dans une mémoire et un terroir particuliers. La composition, sans percée perspective nettement affirmée, est caractéristique des tableaux de cette période. Gauguin allait beaucoup exploiter, en 1885 même, ce type d'organisation plastique où les zones s'imbriquent plus qu'elles ne creusent l'espace. Une sorte de torpeur mystérieuse, de grand silence en résulte. Au premier plan la ligne de la barrière, très japonaise dans son irruption et sa césure, annonce aussi certains des tableaux futurs de Gauguin et Cézanne.
Si la densité de la composition étonne, sa vibration lumineuse marque également par son intensité. Les couleurs sont d'une ardeur et d'un frémissement heureux, loin de la mélancolie qui habitaient les oeuvres de sa période précédente. Verts clairs, jaunes acides, oranges et mauves composent une palette qui semble appeler le ralliement de Pissarro, l'année suivante, au néo-impressionniste de Seurat et Signac.