Le Corsage à carreaux
Lorsqu'il peint cette oeuvre en 1892, au début de sa carrière, Pierre Bonnard découvre l'art japonais grâce à deux expositions parisiennes, la première, en 1888, chez le marchand Siegfried (dit Samuel) Bing, l'autre, deux ans plus tard, à l'Ecole nationale des Beaux-Arts. Il en est très profondément marqué, recevant même au sein du groupe nabi le surnom de "nabi très japonard".
La femme qui a servi de modèle pour Le Corsage à carreaux est Andrée Terrasse (1872-1923), soeur de l'artiste et épouse du compositeur Claude Terrasse.
Cette oeuvre doit son format oblong à l'influence des kakemonos, peintures sur soie ou sur papier, suspendues verticalement, dont la hauteur est, comme ici, sensiblement égale au double de la largeur. Bonnard s'inspire également de la mise en page des Ukiyo-é, ces estampes dans lesquelles les personnages sont souvent coupés par le cadre et qui ignorent la symétrie familière aux oeuvres de l'Occident. Il choisit des angles inhabituels et multiplie les points de vue : la table est regardée en plongée, elle se trouve dans le même plan que le personnage qui, lui, est vu d'en dessous. Bonnard parvient à donner une impression de volume sans utiliser ni la perspective traditionnelle, ni le modelé. Des arabesques qui suggèrent l'anatomie, créent l'illusion de la forme par le dessin.